Moment de sport
Les bisous, c’est gratuit !
Quel plus beau salaire ?
Valérie Buffet
Travailler bénévolement est toujours un choix, pour moi rendu
possible parce que ma situation familiale le permet. Au cœur
de ce choix, un désir fort, presque impérieux, qu’il soit ou non
rétribué. Important à mes yeux de rendre concret et régulier
ce désir de donner, sans argent en retour ; ce qui ne veut nul-
lement dire qu’on n’est pas rémunéré du tout : on l’est d’une
autre manière, qui à son tour n’a pas de prix… Pour moi, c’est
exercer le beau métier d’enseigner la philosophie, transmettre
cet amour de la sagesse qui aimante mes propres question-
nements, irrigue ma quête d’essentiel. Mon lycée? L’hôpital,
avec des élèves, dont les séjours souvent répétés entravent la
scolarité. Ils sont d’autant plus motivés que le risque d’échouer
au bac est réel. Travailler est leur manière de se battre : contre
la maladie, le doute, le découragement, contre une mauvaise
nouvelle qui peut surgir à tout moment. Ils ont déjà une belle
maturité ; aussi les interrogations philosophiques trouvent-elles
en eux un écho plus spontané, des réponses plus immédiates,
plus fortes aussi. Je suis émerveillée par leur courage joyeux,
touchée par leur soif de poursuivre le cours quand il s’achève :
« Vous partez déjà? » Quel plus beau salaire?
extrait
À quand un PIB qui prend en compte la production de l’essentiel ?
Robert Kennedy
Aménagement du territoire
Mathilde Lienhart-Limosin
« Notre PIB prend en compte la publicité pour le tabac et les courses des
ambulances qui ramassent les blessés sur nos routes. Il comptabilise les
systèmes de sécurité que nous installons pour protéger nos habitations et
le coût des prisons où nous enfermons ceux qui réussissent à les forcer. Il
intègre la destruction de nos forêts de séquoias ainsi que leur remplace-
ment par un urbanisme tentaculaire et chaotique. Il comprend la produc-
tion du napalm, des armes nucléaires et des voitures blindées de la police
destinées à réprimer des émeutes dans nos villes. Il comptabilise la fabri-
cation du fusil Whitman et du couteau Speck, ainsi que les programmes
de télévision qui glorifient la violence dans le but de vendre les jouets cor-
respondants à nos enfants… En revanche, le PIB ne tient pas compte de
la santé de nos enfants, de la qualité de leur instruction, ni de la gaieté de
leurs jeux. Il ne mesure pas la beauté de notre poésie ou la solidité de nos
mariages. Il ne songe pas à évaluer la qualité de nos débats politiques
ou l’intégrité de nos représentants. Il ne prend pas en considération notre
courage, notre sagesse ou notre culture. Il ne dit rien de notre sens de la
compassion ou du dévouement envers notre pays. En un mot, le PIB mesure
tout, sauf ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue. »
En janvier 2009, lors de la finale de tennis
de la Hopman Cup entre la Russie et la
Slovaquie, Marat Safin vient s’excuser à
sa manière, après avoir touché la juge
de filet…
Chris Anderson, journaliste américain, auteur de plusieurs
livres sur l’économie de l’internet et l’économie de la
gratuité, propose six grands modes de financement de la
gratuité.
1. Le modèle Premium
Une version gratuite grand public couplée à une version
payante, plus chère et plus évoluée pour un marché de
niche, comme Flickr et les 25 dollars annuels de la version
pro. C’est le modèle de l’échantillon gratuit, si ce n’est que
dans le numérique, une personne qui paye permet à des
milliers d’autres d’avoir une version gratuite.
2. Le modèle publicitaire
3. Les “subventions croisées”
C’est-à-dire l’offre gratuite d’un produit pour vous inciter
à en acheter un autre, comme quand on vous donne un
téléphone en échange d’un abonnement.
4. Le coût marginal nul
Quand il est plus simple d’offrir que de faire payer, comme
le constate sans doute le monde de la musique (en espé-
rant bien sûr faire payer autre chose).
5. L’échange de travail
Vous accédez gratuitement à un service en échange
d’un acte d’utilisation qui crée de la valeur (en amélio-
rant le service ou en créant des informations qui peuvent
être utiles ailleurs). C’est le principe des votes sur Digg, de
Recaptcha…
6. L’économie du don
L’argent n’est pas la seule motivation. De Freecycle à Wiki-
pédia, l’altruisme, l’économie du partage, montrent qu’il y
a peut-être d’autres façons de créer de la valeur.
Mathilde avait écrit dans le dernier
Slow
,
sur le thème du courage, son courage
face à la maladie.Au moment où j’écris,
Mathilde n’est plus de ce monde,elle ve-
nait d’avoir 41 ans, Mathilde n’a pas eu
d’enfant,mais sa fécondité est immense
et nombreux sont ceux qui peuvent dire
qu’elle les a libérés, poussé à aller de
l’avant. Elle vivait une aventure immo-
bile, emprisonnée dans la maladie et
des souvenirs difficiles. Mathilde écrivait
un blog qui jetait un regard amusé sur
la vie, tournait les épreuves en dérision,
« car c’était le seul moyen de survivre
dans ces conditions ». Elle a dû se faire
construire un ascenseur pour se dépla-
cer chez elle. Deux entreprises sont ve-
nues… Je vous laisse lire la suite…
« Lorsque je suis tombée malade, je
me suis vite rendu compte avec mes
jambes qui se paralysaient que je n’al-
lais pas pouvoir indéfiniment monter les
18marches pour rejoindrema chambre.
Nous avons donc, à la demande de
la MDPH (Maison pour le handicap),
effectué des devis pour construire
un ascenseur, l’option trampoline
n’ayant pas été retenue par Charmant
(mon mari).
Si j’ai depuis toujours une aversion
pour la médecine surtout avec tous
les examens médicaux que j’ai subis,
envisager d’aménager ma maison en
réalisant que ma paralysie était bien
réelle était assez nouveau et déroutant.
La première entreprise nous a présenté
l’installation d’un ascenseur comme on
installe une porte au milieu d’un mur.
Tout était possible, tout était réalisable
comme par hasard, pourvu qu’on signe
un contrat n’importe lequel…
Puis, il y a eu la visite d’une deuxième
entreprise… Jean Yves… Dans ses
yeux à son arrivée, j’ai lu : “Je ne vous
promets pas l’impossible, mais nous
allons trouver une solution adaptée à
vos besoins et qui respecte l’architec-
ture de votre maison.” Je me souviens
l’avoir accueilli dans ma chambre en
lui disant que j’acceptais son projet,
que je choisissais son entreprise. Ce à
quoi il m’a répondu qu’il n’avait pas vu
la maison et qu’il n’avait pas encore
établi son devis ! Nous avons parlé de
la vie, de la maladie, de l’espoir, du
hasard qui n’existe pas et Jean-Yves
m’a appris une phrase essentielle :
“Grâce à” et pour la première fois, j’ai
reconsidéré ce qui m’arrivait et je réa-
lisais tout ce que j’avais fait et que j’al-
lais faire grâce à la maladie… »
Ailleurs
La gratuité, avenir de l’économie?
Chris Anderson
mosaïque
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